Ni faux ni vrai, bien au contraire

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On le sait, on en parle à l’occasion, une bonne partie du public éprouve des doutes à l’égard de l’information que lui fournit la presse. Les médias méritent-ils notre confiance ? En d’autres termes, avons-nous raison de douter ? C’est le point de départ de mon nouveau livre, INTOX, journalisme d’enquête, désinformation et « cover-up », publié chez Québec Amérique.

Je montre dans ce livre, exemples à l’appui, que les médias sont capables non seulement de publier des « enquêtes » boiteuses, voire qui s’avèrent des fiascos, mais aussi de les défendre coûte que coûte, même lorsque la démonstration est solidement faite qu’ils ont erré dans les grandes largeurs. Il ne s’agit pas de généraliser, mais de constater que la presse tolère assez bien l’erreur et répugne à redresser adéquatement la situation lorsqu’elle est prise en défaut. On corrige des petits trucs, à l’occasion, pour donner le change, mais les histoires fondamentalement erronées survivent aisément. Comme l’écrivait Jean-François Revel, « venir à résipiscence n’est pas la passion dominante de la presse ».

Pour les médias, le véritable impératif, la valeur dominante, qui prennent le dessus lorsqu’un choix doit être fait, c’est l’autopréservation. Il faut, avant toute chose, protéger le système, c’est-à-dire refuser tout ce qui pourrait être perçu comme un signe de faiblesse susceptible d’altérer son image : écouter, reculer, corriger, s’expliquer, faire amende honorable.

Je mets de l’avant des histoires bien réelles, des enquêtes que je qualifie de fausses, au sens où les règles de l’art de la profession ont été bafouées, avec des résultats catastrophiques. Et ce matériel laisse des traces. Je m’attarde notamment au mouvement antivaccination. Les médias n’en sont pas la cause, mais ils font partie, sans le moindre doute, de son histoire, et ils ont indéniablement contribué à son essor. De même, l’intolérance envers les minorités ne serait pas ce qu’elle est sans la contribution de certains médias. Bref, il y a des conséquences, un mot que certains médias n’aiment pas.

C’est une petite partie de l’information, a priori, qui est fausse ou trompeuse, il faut l’espérer. Mais le public n’a aucun moyen de distinguer ce qui est fiable et ce qui ne l’est pas, surtout quand on constate qu’il n’est pas si difficile de publier un texte dénué de faussetés grossières, et pourtant complètement à côté de la plaque. Le citoyen moyen en est réduit à se demander sans cesse si le journaliste qui s’adresse à lui pratique ce grand art qui consiste à ne rien dire de faux tout en ne disant rien de vrai. Et les médias, en plus, ont mis au point diverses techniques de camouflage et d’esquive, qui vont de la « sortie côté jardin » à la « prise de judo », en passant par le « lipstick on the pig » et le « doigt d’honneur ».

Je m’attarde également à la question des conseils de presse, à l’égard desquels on ne peut avoir que des attentes très modestes, tant que l’industrie de l’information exercera sur eux un contrôle aussi serré. L’industrie a capturé ses régulateurs. Mais réformer les conseils de presse supposera une bataille assez rude, qui demandera, si un jour elle a lieu, une bonne dose de leadership de la part du politique. Le jour où ils s’attelleront à la tâche, qu’ils se mettront à l’œuvre pour sauver le journalisme et consolider l’indépendance des journalistes, vous verrez que les élus seront accusés de s’attaquer à la liberté de presse.

INTOX, journalisme d’enquête, désinformation et « cover-up » est disponible dans toutes les bonnes librairies. On peut aussi le commander auprès de mon éditeur, Québec Amérique, de même que chez Renaud-Bray, Archambault, Indigo et Les libraires, de même que sur d’autres sites transactionnels.

© Michel Lemay