La crise de confiance

Un sondage Gallup mené en 2016 indique une forte baisse de la confiance qu’éprouve le public américain envers les médias. À peine un tiers des répondants estime que l’information est relativement exacte et complète. Par ailleurs, illustration d’un clivage qui est loin d’être rassurant, le public qui s’identifie aux Républicains ne croit pratiquement plus rien de ce qu’on lui raconte, avec un taux de confiance de 14 % (contre 51 % du côté Démocrate, et 30 % chez les indépendants, rien de reluisant).[1]

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Absolution pour une fausse nouvelle

Étrange décision[1] que celle rendue publique par le Conseil de presse du Québec il y a quelques jours, qui a « absous » la publication d’information fausse et me semble ouvrir une brèche dans un standard professionnel universellement accepté, que personne, à ma connaissance, ne conteste. Le principe d’exactitude, mis en avant par tous les codes de déontologie, et qui joue un rôle central dans l’idéal de rigueur, est mis à mal par cette décision malencontreuse. Pourra-t-on désormais tourner les coins ronds et s’en tirer en qualifiant l’information inexacte de « secondaire » ?

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Andrew, Jan et nous autres aussi

Andrew Potter, directeur de l’Institut d’études canadiennes de l’Université McGill et ancien rédacteur en chef du Ottawa Citizen, a publié un billet d’humeur intempestif dont il s’est excusé en partie. Son texte, dont il faut parler au présent puisque le média qui l’a publié, Maclean’s, ne l’a pas retiré,[1] tente sans succès de faire tenir ensemble des informations éparses, dont certaines sont douteuses, pour nous transporter dans un univers parallèle. Une tempête de neige et son cafouillage, des policiers en pantalons de camouflage, des factures de restaurant et de garage, des statistiques sur l’amitié s’y entremêlent pour nous transporter nulle part ailleurs que dans la tête de quelqu’un, où ces affaires mal assorties seraient la démonstration convaincante que le Québec est une société aliénée (« Compared to the rest of the country, Quebec is an almost pathologically alienated and low-trust society, deficient in many of the most basic forms of social capital that other Canadians take for granted ». Rien de moins).[2]

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Toronto Star and Gardasil: An Autopsy

On February 5, 2015, the Toronto Star published an investigative article headlined “A wonder drug’s dark side.”[1] The story was on the front page, above the fold. It was endorsed in an editorial. It emphasized that at least 60 young Canadian women had suffered serious health problems after receiving a shot of the anti-cancer HPV vaccine Gardasil, manufactured by Merck & Co. One had died, another had needed a wheelchair, still another had to use a feeding tube. A basis for the story was that patients and families believed the vaccine had dangerous side effects and presented risks that were downplayed or kept from view by the medical community. The Star was openly supportive. It wrote: “In the U.S., where there is a public database of vaccine-related side-effect reports collected from around the world, the Star found thousands of suspected cases, including more than 100 deaths,” and that in another database, in Canada, it had “found more than 50 ‘serious’ incidents, including at least 15 hospitalizations connected to the vaccine” and two deaths. The Star also said: “The public is getting incomplete information about Gardasil from officials in Canada.” The article came with heartbreaking online video testimonials.

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Autopsie: le Toronto Star et Gardasil

Le 5 février 2015, le Toronto Star publiait les résultats d’une « enquête » portant sur le Gardasil, un vaccin anticancer fabriqué par Merck & Co. L’article, endossé le même jour en éditorial et intitulé « Le côté sombre d’un médicament miracle », occupait toute la partie supérieure de la une.[1] Il révélait qu’au moins 60 jeunes Canadiennes avaient souffert de problèmes de santé sérieux après une injection de Gardasil. Une avait eu besoin d’un fauteuil roulant, une autre d’une sonde gastrique, une autre était décédée. Le point de départ de la nouvelle était que les patients et leurs familles « croyaient » que le vaccin avait des effets secondaires dangereux et présentait des risques que la communauté médicale sous-estimait, voire dissimulait. Le Star appuyait ouvertement cette théorie, écrivant entre autres « qu’aux États-Unis, dans une base de données où sont répertoriés des rapports d’effets secondaires venant de partout dans le monde, nous avons découvert des milliers de cas suspects, incluant plus de 100 décès », qu’au Canada, dans une autre base de données, le Star avait découvert 50 incidents sérieux, « liés au vaccin », incluant 15 hospitalisations et deux décès et que « le public canadien ne reçoit qu’une information incomplète au sujet du Gardasil ». Lire la suite

Père Noël, apporte-moi des bonnes nouvelles

«There can be no liberty for a community which lacks the means by which to detect lies».[1] Aurons-nous un jour des nouvelles certifiées ISO 9001 ? Est-ce croire au Père Noël ? Une forte majorité d’Américains, 88 %, estiment que les fausses nouvelles entraînent de la confusion. Mais 23 % d’entre eux ont contribué à les disséminer, parfois en toute connaissance de cause, selon le Pew Research Center.[2] La plupart de ceux qui ont été exposés à ces nouvelles y croient.[3] Nous aurions donc, d’une part, des gens qui ne sont pas en mesure de démêler le vrai du faux, et qui en conséquence sont disposés à douter de tout ou à croire n’importe quoi. D’autre part, nous vivrions dans un monde où chacun peut maintenant choisir sa vérité pour ne plus en démordre. Vous pourrez toujours essayer de les convaincre, preuves à l’appui, rien n’y fera, vous ne ferez que renforcer la croyance initiale. L’ère de l’information ? Non, la fiction et le réel sont sur le point de se trouver irrémédiablement entremêlés, du moins pour une partie de la population. Et comment pouvez-vous être certain, vraiment certain que ce n’est pas votre cas ? Qu’est-ce qui vous prouve que ce que vous croyez est vrai ?

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Qui fabrique les fausses nouvelles ?

On demande ces jours-ci des comptes à Twitter, et surtout à Facebook. Les grands réseaux sociaux auraient, en poussant fausses nouvelles et propagande, fait le jeu des agitateurs et influencé les résultats de l’élection américaine. Mark Zuckerberg, sur la défensive, a déclaré que selon lui 99 % de l’information qui circule sur Facebook est authentique, pour ajouter plus tard, tout de même, que ses équipes allaient examiner le problème. Craig Silverman, de BuzzFeed, a publié le 16 novembre des chiffres peu rassurants. Pendant la dernière partie de la campagne, les 20 fausses nouvelles les plus populaires auraient entraîné plus d’activité (8,7 millions de réactions, partages, commentaires) que le top-20 des vraies nouvelles en provenance de 19 médias (7,3 millions). Presque toutes ces fausses nouvelles étaient pro-Trump ou anti-Clinton. Lire la suite

Journalistes espionnés: on régresse

Au Québec, un nombre inconnu de journalistes ont été surveillés par au moins deux corps policiers, certains d’entre eux pendant des années, avons-nous appris ces derniers jours. Pas parce qu’ils étaient soupçonnés d’un crime, mais parce que la police cherchait à identifier leurs sources. Leurs appels téléphoniques entrants et sortants ont été recensés, et dans au moins un cas il y a eu filature virtuelle. Avec raison, les médias traitent l’affaire comme un scandale. C’en est un.

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Dumping Snowden

Were you taken aback by the Washington Post‘s recent editorial stance opposing a presidential pardon for Edward Snowden?[1] I don’t know if this is a first, but as journalist Glenn Greenwald[2] correctly pointed out, no precedent comes to mind: here’s a top-tier, credible news outlet, which, after probing the information, deeming it in the public interest, publishing it, then winning an award for it, dumps the source, denying him the sacrosanct protection that in the past benefited many so-called whistle-blowers who may have had much more dubious motives. Lire la suite

Faut-il sauver le soldat Snowden?

Nombreux sont ceux qui ont été surpris par la position prise en éditorial par le Washington Post, qui a exprimé ouvertement son opposition à un hypothétique pardon présidentiel pour Edward Snowden.[1] Je ne sais pas si c’est une première, mais comme l’a signalé le journaliste Glenn Greenwald,[2] aucun précédent ne vient à l’esprit : un quotidien majeur, très crédible, qui a jugé d’utilité publique les déclarations de sa source, qui les a soupesées et publiées, et qui s’est auréolé de gloire grâce à elles, lui refuse la sacro-sainte protection et l’indulgence que les médias ont offert dans le passé à bien des sources dont on pourrait discuter les motifs ou les actions. Certains ont relevé l’ironie : le Washington Post doit une partie de son capital de crédibilité à une source, Mark Felt, qui lui transmettait des informations confidentielles alors qu’il était no. 2 du FBI. Je parle ici, bien sûr, de Deep Throat et du scandale du Watergate. Aurait-il fallu que Snowden demande l’anonymat ? Lire la suite